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Page:Eugène Le Roy - Nicette et Milou, 1901.djvu/186

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lui trempent une soupe taillée avec les meilleurs croûtons ramassés par les droles, mais ça n’est pas ça qui peut le remettre sus.

Un matin, à la pointe du jour, il se tourne vers la Barbote couchée contre lui et demande à boire. Elle se lève, et lui apporte de l’eau dans le godet de bois à puiser au seau. Il boit cette eau froide et dit, sentant son estomac faible :

— Je crèverai bien sans avoir jamais mangé mon saoul !

Après cette parole, il se laisse aller sur le traversin, fait un grand : « ah ! » de soulagement, ferme les yeux et meurt comme qui s’endort.

Les droles voient le père mort sans ciller ; aucun ne se lamente, nul ne pleure. À tous, cette mort semble une délivrance :

— Il a fini de souffrir ! dit la Barbote.

Le pauvre Curo-toupi mis en terre, la famille se disperse. La femme avec son plus jeune enfant sur les bras, s’en va du côté de la Boissière chercher un peu d’aide chez un frère aussi pauvre qu’elle, ou de guère s’en faut.