Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/300

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allait en avoir quinze. A nous deux, nous pourrions réparer le temps perdu ; dans tous les cas, j’aurais la satisfaction de lui donner un état plus heureux et plus honorable que celui qui avait été le mien jusque-là. Le décès de mon père trancha la question. Je me décidai à faire valoir avec mes frères l’héritage commun. Ils m’aidèrent à faire les frais des noces de mes trois filles aînées qui étaient fiancées, mais dont j’avais retardé le mariage sous différents prétextes parce que je n’étais pas assez riche pour en supporter la dépense, et qu’il m’en coûtait de l’avouer. Je n’ai eu, depuis, que deux autres enfants ; une fille mariée depuis plusieurs années et mon second fils que vous avez vu, le dernier de mes enfants, marié à son tour il y a deux ans. — Pourquoi, si jeune, est-il séparé de vous ? demandai-je à Ouang-Ming-Tse. — J’allais vous le dire, Si-Lao-Yé. Jusqu’il y a deux ans, ni mes frères, ni mes neveux, ni moi n’avions songé au partage des intérêts. Chacun de nous avait son habitation particulière, mais nos travaux et nos profits étaient communs. Je ne dis pas que cet état de choses fût sans inconvénient et pût éternellement durer ; mais enfin personne n’avait encore eu sérieusement l’idée de le changer. L’arrivée de ma jeune bru nous y fit penser. Elle était d’un caractère défiant, inquiet, persuadée que l’on était injuste à l’égard de son mari. Il faut écouter sa femme et ne pas la croire, dit le proverbe ; mais mon fils n’était que trop disposé à croire la sienne ; elle avait sur lui une influence extraordinaire. Elle paraissait