Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/334

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seraient en état d’expliquer. Quoi qu’il en soit, voici maintenant la légende qui s’est greffée sur cette idée :

L’Empereur Yung-Lo, le troisième de la dynastie des Ming, lequel régnait de 1403 à 1425 de notre ère, avait la passion des cloches. Il en fit fondre cinq dont la plus petite pèse au moins 75,000 kilogrammes. Il n’en était qu’à la première et il venait de terminer la construction de la tour où elle devait être placée, lorsqu’il en ordonna la fonte à un mandarin nommé Houang-Yu. Une première opération ne réussit point ; une deuxième faite à quelques mois d’intervalle n’eut pas plus de chance. Dans les deux cas la fonte était remplie de trous et de bulles d’air, et l’empereur, furieux, déclara qu’à un troisième insuccès il ferait tomber la tête de l’infortuné mandarin. Ce n’était sans doute qu’une parole en l’air comme en disent les monarques. — Yung-Lo était habituellement un prince sage ; il fit détruire les livres d’alchimie qui trompaient le peuple ; il rendit à la vie séculière tous ceux qui s’étaient faits bonzes avant l’âge de quarante ans, et il était grand ami des lettres. Il n’y avait donc pas à craindre qu’il se souvînt de sa menace et la mît à exécution. Mais le pauvre Kouang-Yu pouvait du moins redouter une disgrâce ; et, dans tous les cas, son habileté en défaut, sa réputation compromise étaient des causes plus que suffisantes d’une tristesse qu’il ne parvenait pas à dissimuler. Kouang-Yu avait une fille de seize ans, belle comme les premières fleurs du cognassier et il l’aimait