Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/370

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terre ou argent, n’a de valeur que pour celui qui le met en œuvre. Lui supposer une puissance de production par lui-même ; se supposer à la fois prêteur et emprunteur, le maître et l’esclave de ce capital, est une fiction qui n’entrera jamais dans la tête d’un Chinois. Voilà pourquoi Ouang-Ming-Tse n’a pas voulu séparer de prétendus intérêts de son profit net. « Que ferais-je de mon argent ? me disait-il. Pas de grand-livre comme chez vous, et pas d’emprunteur qui se charge de le faire travailler pour moi ; il faut bien que je le fasse travailler moi-même, ou bien que j’aie des enfants pour m’y aider. A cause des vicissitudes de ma carrière, je n’ai pu en avoir beaucoup, mais Po-Y, qui a déjà six enfants, en aura d’autres encore, je l’espère, et en attendant nous confions à l’un de mes frères, marchand à Fou-Tcheou, ce que nous ne pouvons mettre en œuvre. Il l’emploie dans son commerce, auquel il nous a associés. Mais il faudra bientôt en reprendre une partie, puisque Siu-Lien va se marier. Mon petit-fils aîné ne tardera pas à en faire autant, et nous devons penser à étendre nos cultures. Je sais bien que vous pouvez dire que nous devenons ainsi créanciers et débiteurs les uns des autres ; la vérité est qu’au fond nous travaillons les uns pour les autres ; et lorsque l’âge me contraindra au repos, mes enfants à leur tour travailleront pour moi. N’aurai-je pas commencé à travailler pour eux ? Quoi de plus juste par conséquent ! Et de plus simple, Ouang-Ming-Tse, et de plus fécond.