Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/303

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mon corps ? ma longue vie m’a instruite. Oui, il vaut mieux pour les mortels former des amitiés modérées, et non qui pénètrent jusqu’au fond de l’âme ; il vaut mieux pour le cœur des affections faciles à rompre, qu’on puisse resserrer ou lâcher à son gré. Mais être seule à souffrir pour deux, comme je souffre pour elle, c’est un lourd fardeau. Il est bien vrai de dire que les passions excessives sont plus funestes qu’agréables dans la vie, et qu’elles nuisent au bien-être. Aussi, à tout excès je préfère la maxime, Rien de trop ; et les sages seront d’accord avec moi.

Le Chœur.

Vieille et fidèle nourrice de notre reine, nous sommes témoins des infortunes de Phèdre ; mais nous ignorons quel est son mal, et nous voudrions l’apprendre de toi.

La Nourrice.

Je l’ignore, malgré mes questions ; elle refuse de le dire.

Le Chœur.

272Tu ignores aussi la cause de ce mal ?

La Nourrice.

Je n’en sais pas plus que toi ; elle garde sur tout cela un profond silence.

Le Chœur.

Comme son corps est affaibli, et consumé de langueur !

La Nourrice.

Et comment ne le serait-il pas, depuis trois jours qu’elle n’a pris de nourriture ?

Le Chœur.

Est-ce l’effet de la maladie, ou dessein formé de mourir ?

La Nourrice.