Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/47

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CUBE.

Elle était allée puiser de l’eau, pour laver le corps de Polyxène.

AGAMEMNON.

Sans doute cet hôte perfide, après l’avoir égorgé, l’a jeté dans la mer.

HÉCUBE.

Il l’a abandonné aux vagues, après l’avoir ainsi déchiré.

AGAMEMNON.

Malheureuse ! quelles douleurs sans mesure !

HÉCUBE.

Je suis perdue, Agamemnon ; rien ne manque à mon malheur.

AGAMEMNON.

Hélas ! quelle femme fut jamais si infortunée !

HÉCUBE.

[786] Il n’en est point, si ce n’est l’infortune elle-même. Mais écoute pourquoi je tombe à tes genoux. Si mes maux te semblent mérités, je les supporterai avec patience ; sinon, sois mon vengeur, et punis un hôte sacrilège qui, sans crainte des dieux infernaux ni des dieux du ciel, a commis le forfait le plus impie. Lui, qui s’assit souvent à la même table avec moi, le premier entre les amis que les liens de l’hospitalité unissaient à nous, qui avait reçu de nous tout ce qu’il désirait, et qui avait été prévenu par nos bienfaits, c’est lui qui tue mon fils ; il le tue, et, sans daigner lui accorder la sépulture, il le jette à la mer. Je suis esclave et sans force, mais les dieux sont puissants, ainsi que la loi qui règne sur eux : car c’est par la loi que nous connaissons les dieux, et que nous distinguons dans la vie le juste et l’injuste : cette loi qui te demande appui, si on la foule aux pieds, si ceux