Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/49

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 plus qu’un mot à dire. Que ne puis-je prêter un langage à toutes les parties de mon corps (34), et, tenant tes genoux embrassés, t’attendrir par mes larmes et mes supplications ! — O mon maître !… ô lumière de la Grèce ! laisse-toi toucher, prête ton bras vengeur à ma vieillesse. Je ne suis rien ;… n’importe, il est digne d’un grand cœur de servir la justice, et de punir les méchants en tout temps et en tous lieux.

LE CHŒUR.

Étrange destinée des mortels ! la puissance de la justice (35) décide de nos liaisons les plus intimes ; elle, change en amis les ennemis les plus déclarés, et rend ennemis ceux qui s’aimaient le plus.

AGAMEMNON.

[850] Hécube, je suis touché de compassion pour toi, pour ton fils, pour ton infortune et tes supplications : je voudrais, par respect pour les dieux et pour la justice, te venger d’un hôte sacrilège, s’il était quelque moyen de te satisfaire, sans paraître aux yeux de l’armée avoir immolé le roi des Thraces à mon amour pour Cassandre. Je ne suis pas, à ce sujet, exempt de trouble : l’armée regarde cet homme comme son allié, et celui qu’il a fait périr, comme notre ennemi. Si ce dernier t’est cher, le sentiment que tu éprouves n’est point partagé par