Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/171

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les lambeaux aux vents rapides, pour qu'ils te les portent, ô dieu prophète. Où est le vaisseau des Atrides? Sur lequel dois-je monter? Empressé d'ouvrir tes voiles aux vents favorables, emporte-moi au plus tôt loin de cette terre commune des trois Furies. Adieu, ma mère, arrête tes larmes. O chère patrie, et vous mes frères, habitants des enfers, et toi mon père, je 'vous rejoindrai bientôt. Je viendrai victorieuse parmi les morts, après avoir détruit la maison des Atrides-, auteurs de notre ruine.

(Elle part avec Talthyblus.)

LE CHOEUR.

[462] Gardiennes de la vieille Hécube, ne voyez-vous pas votre maîtresse sans voix .étendue sur la terre? Allez donc à son secours. Ah! malheureuses, l'abandonnez-vous dans sa détresse? Relevez son corps abattu.

HÉCUBE.

[466] Laissez-moi, jeunes Troyennes, vos soins me sont a charge ; laissez -moi prosternée sur la terre ; c'est l'état qui convient aux maux que j'éprouve, à ceux que j'ai soufferts et que je dois souffrir encore. O dieux ! C'est en vain que j'invoque ces dieux lents à nous secourir; cependant il sied aux mortels de les appeler, lorsque l'on tombe dans l'infortune. D'abord il m'est doux de retracer le souvenir de mes prospérités; j'inspirerai ainsi plus de pitié pour mes souffrances. J'étais reine, je devins l'épouse d'un roi, et je donnai le jour à de nobles enfants, non pas seulement d'un mérite vulgaire, mais les premiers des Phrygiens, et tels qu'aucune femme troyenne, grecque ou barbare, ne peut se glorifier d'en posséder de pareils. Je les ai vus périr sous la lance des Grecs, et j'ai coupé ma chevelure sur leur tombeau. Et Priam, leur père, ce n'est pas sur un