Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/182

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

point de la terre, armé de sa lance redoutable, pour être ton libérateur ; ni sa famille ni la puissance phrygienne ne peuvent te secourir. Impitoyablement précipité la tête la première du haut d'une roche, tu vas rendre le dernier soupir. O fils chéri que je presse entre mes bras, douce haleine que je respire ; c'est donc en vain que ce sein t'a nourri, en vain je me suis épuisée de peines et de tourments ! Pour la dernière fois embrasse ta mère, presse-toi contre son cœur, de tes bras entoure mon corps, et que ta bouche s'unisse à la mienne. O Grecs, qui inventez des supplices dignes des Barbares, pourquoi faites-vous périr cet enfant innocent? O race de Tyndare, non, tu n'es pas la fille de Jupiter; les auteurs de tes jours furent une Furie, et l'Envie, et le Meurtre, et la Mort, tous les monstres qu'enfante la terre. Non, jamais Jupiter n'a pu produire ce fléau des Grecs et des Barbares. Sois maudite, toi dont la beauté funeste a indignement ravagé les champs de la Phrygie !

Prenez, emportez, précipitez mon fils, si tel est votre plaisir ; faites de ses chairs un horrible festin, puisque les dieux sont les auteurs de notre désastre, et que je ne pourrais arracher mon fils à la mort. Cachez mon corps misérable, plongez-le au fond de votre vaisseau. Heureux auspices pour un hymen, de le souiller du sang de mon fils !

(Elle sort.)

LE CHOEUR.

[780]Malheureuse Troie, quelle foule de guerriers tu as perdus, à cause d'une seule femme et d'une odieuse union !

TALTHYBIUS.

Va, jeune enfant, arrache-toi aux embrassements d'une mère désespérée ; monte au sommet de ces remparts qui furent l'héritage de tes pères, c'est là que l'arrêt des Grecs le