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ION.

Créuse

Ô Apollon, aujourd’hui, comme autrefois, tu te montres bien injuste envers la femme absente pour laquelle je parle ici. Tu as laissé périr ton fils, sur lequel tu aurais dû veiller ; et quoique prophète, tu ne réponds pas à sa mère, pour que du moins, s’il n’est plus, elle lui érige un tombeau, et que, s’il vit encore, il paraisse enfin aux yeux de sa mère. Eh bien ! il faut se résigner, si le dieu refuse de m’apprendre ce que je veux savoir. Mais, ô étranger, je vois Xuthus, mon noble époux, qui s’avance ; il sort de l’antre de Trophonius ; ne lui révèle pas nos entretiens, de peur de m’attirer quelque reproche pour ce secret divulgué, et que mes paroles ne soient mal interprétées ; car la condition des femmes est bien malheureuse vis-à-vis des hommes : les bonnes sont confondues dans une haine commune avec les méchantes.




Xuthus

Que mes premières paroles s’adressent au dieu pour lui rendre hommage ; et toi aussi, femme, salut. Mon retour tardif ne t’a-t-il point causé d’inquiétude ?

Créuse

Non, mais tu es arrivé à temps pour la prévenir. Mais dis-moi quel oracle tu rapportes de l’antre de Trophonius, et quel espoir il nous reste d’avoir des enfants.

Xuthus

Il n’a pas voulu devancer lai réponse du dieu ; il m’a dit seulement que ni toi ni moi nous ne reviendrions de Delphes sans enfant.