Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/182

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employés dans le commerce ordinaire des denrées ; il y a donc en plus le colportage. Les marchands d’esclaves partent avec leur troupeau et vont d’habitation en habitation, offrant leur marchandise, vendant ici, achetant là ; s’approvisionnant, chemin faisant, selon qu’ils savent les besoins de telle ou telle localité, soit en hommes, soit en femmes, soit en jeunes nègres. Ce commerce a donc sa mercuriale et ses informations précises comme toutes les industries. Le nègre est décidément une marchandise de spéculation aux États-Unis.


III


Je reviens à Manette.

Églantine avait été surprise et attristée que la jeune cabresse lui demandât un billet pour aller chercher un maître.

— Es-tu folle ? lui dit-elle.

— Non, répliqua Manette, je ne suis pas folle. Je veux changer de maître !

— Tu sais bien, répliqua Églantine, que déjà on a voulu t’acheter, et…

— Ah ! oui, M. de Gerbier, interrompit Manette en regardant Églantine qui rougit à ce nom…

— Et, continua la jeune fille, je me suis refusée à te vendre, parce que je compte te faire cadeau de ta liberté…

— Quand ? demanda la cabresse.

— Mais le jour de mon mariage.

Un étrange sourire effleura les lèvres de Manette ; ses