Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/287

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Chacune de ces découvertes s’en allait à la ville prenant des proportions de plus en plus exagérées, et qu’on ne savait pas si près de la vérité. Enfin, du jardin on entra dans le salon du pavillon, où l’on trouva le cadavre d’André, et Tobine dans ce désordre que nous avons décrit plus haut.

Les premiers qui firent cette découverte hideuse s’enfuirent à toutes jambes et tinrent bouche close ; car telle était l’organisation bizarre de la justice de l’île de Cuba à cette époque, que les témoins appelés à déposer d’un crime étaient plus maltraités souvent que le criminel lui-même.

Il était arrivé même qu’un assassin, un voleur, un faussaire, fût acquitté, et que les témoins en fussent pour leurs frais, qu’ils payaient quelquefois de leur fortune d’abord, et plus tard de leur vie. La justice avait peur des complices mystérieux de l’accusé, et se mettait à l’abri par l’acquittement de crimes avérés, en laissant la responsabilité de l’accusation peser tout entière sur les témoins et sur les révélateurs.

C’était donc à qui se garderait de dénoncer un crime, ou de l’attester, les preuves devenant nulles pour la justice devant des menaces anonymes.

On comprend pourquoi les premiers qui découvrirent l’horrible spectacle qu’offrait le salon de la Magnificencia, se tinrent sur la réserve ; mais tant de monde entra et sortit de ce pavillon qu’à la fin la nouvelle du crime arriva à la ville, sans qu’on pût dire de qui on la tenait.

Aux premiers mots qui en furent prononcés devant José, le malheureux Indien poussa un cri de douleur, et conduisant lui-même l’alguazil-mayor, qui ne s’en souciait guère à vrai dire, il se rendit à la Magnificencia.