Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/234

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sans bruit, comme une planchette glissant silencieusement en des rainures invisibles.

Quelques minutes encore s’écoulèrent : le Moine Noir réfléchissant toujours, Monsieur Gaston attentif et anxieux.

Soudain un bruit de pas dans l’escalier, un filet de lumière et un murmure de voix firent tressauter les deux hommes.

Et avant que le docteur Randall et Monsieur Gaston fussent revenus de leur surprise, quatre soldats commandés par un sergent firent irruption dans le cachot.

Monsieur Gaston se croyant perdu, n’entrevit nullement la possibilité d’une résistance.

Quant au docteur Randall, un coup d’œil lui suffit pour juger la situation.

Les soldats étaient sans armes apparentes. Seul le sergent était armé de sa baguette d’ordonnance.

Or, Randall avait toujours son revolver fait dans la forme d’un crucifix : cela lui parut suffisant.

Aussi cria-t-il à Monsieur Gaston :

— Suivez-moi ! —

En même temps il saisit son crucifix et le braquant sur les cinq hommes ahuris, il fit feu trois fois.

Trois hommes roulèrent sur le sol, pendant que les deux autres terrifiés se rejetaient dans l’ombre vers un coin de la cave.

— En avant ! rugit la voix forte du docteur.

Et il se précipita vers l’escalier suivi de Monsieur Gaston à qui la peur donnait des ailes.

L’instant d’après, ils étaient dans le vestibule.

Mais là un factionnaire, accouru au bruit des détonations barrait le passage de la porte de sortie.

Au même instant, par tout l’édifice on distinguait une rumeur de pas précipités, d’éclats de voix et d’appels mêlés aux battements des portes.

Randall comprit qu’à l’instant allait surgir tout le personnel de l’État-major et qu’une seconde de retard seulement pouvait les perdre.

Par un rapide mouvement il pressa un ressort de son crucifix singulier, une lame de couteau glissa au bout du canon, et dans le même instant le factionnaire tombait la gorge ouverte par l’arme terrible qui y restait plantée.

Et Randall toujours suivi de Monsieur Gaston, se ruait vers la porte l’ouvrait et s’élançait dans la nuit… dans la liberté…

— Sauvés ! haleta-t-il.

Et sans s’arrêter une seconde, il saisissait une main de Monsieur Gaston, traversait la rue en courant, enfilait une petite ruelle étroite et très noire, et arrivait bientôt auprès d’une limousine qu’on pouvait à peine distinguer.