Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/258

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Marcil s’était penché sur le jeune homme appuyant l’oreille sur sa poitrine.

— Non… dit-il en se relevant le cœur bat il reste encore un peu de vie.

— En ce cas, nous n’avons pas de temps à perdre il faut le sortir d’ici.

Sans plus un mot Raoul souleva le blessé par les épaules et Marcil s’empara de l’unique jambe.

Alors commença une marche difficile et lente vers l’orifice du souterrain, — souterrain disons-le qui ne mesurait que quatre pieds de hauteur sur une largeur d’à peine deux pieds. Si bien que nos deux amis étaient forcés de marcher à demi courbés, et de tâter à chaque instant des parois sommairement étançonnés pour ne pas se heurter à quoi que ce soit et éviter toute secousse au blessé.

Et c’est après peines et misères qu’ils parvinrent à la tranchée au moment où le sergent Ouellet et le caporal Bédard, suivis de quelques camarades, arrivaient à leur recherche.

La vue du corps mutilé de Jules Marion les cloua sur place figés d’horreur.

Mais il n’y avait pas de temps à perdre en émotions. Raoul, le savait. Aussi ordonna-t-il aussitôt qu’on se mit en quête d’un brancard.

Le sergent Ouellet partit à la recherche d’une civière, pendant que le caporal Bédard se mettait en quête d’un infirmier.

Mais du train que les obus commençait à tomber Raoul comprit que l’endroit était excessivement dangereux.

— Faisons un effort pour le porter jusqu’à l’arrière, dit Raoul.

— Je suis prêt, approuva Marcil.

Et, comme ils s’y étaient pris pour sortir Jules du souterrain de même ils enfilèrent le boyau communiquant avec les tranchées de l’arrière.

Partout jusqu’à la dernière tranchée existait un va-et-vient lamentable.

On transportait les blessés par centaines…

Les ambulances manquaient…

On fabriquait à la hâte des brancards que le service des ambulances ne pouvait plus fournir.

Des blessés mouraient chemin faisant de la tranchée aux ambulances faute de soins immédiats à cause de la pénurie d’infirmiers.

Raoul Constant et Marcil étaient enfin parvenus tout à fait à l’arrière avec leur triste fardeau. Là ils attendirent pendant quelques minutes le sergent Ouellet et le Caporal Bédard l’un avec le brancard — l’autre avec l’infirmier.

Disons de suite qu’ils ne devaient pas trouver ce qu’ils étaient allés chercher.

Après avoir déposé Jules sur la lisière d’un petit bois à moitié haché par la mitraille le lieutenant et Marcil songèrent à fabriquer une espèce de brancard.