Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/285

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— Je demeurai donc seul sur la lisière du petit bois où mes camarades m’avaient déposé. Vingt minutes s’écoulèrent. Tout à coup à travers les buissons du voisinage je vis un homme, vêtu en ouvrier, mais un homme que je reconnaissais bien, s’avancer furtivement dans ma direction. À dix pas de moi cet homme — cet ennemi que je redoutais — s’arrêta pour me lancer un regard de haine. Puis ses lèvres esquissèrent un sourire cruel. L’homme se rapprocha de moi à pas lents et en jetant autour de lui des regards scrutateurs. Je frémis. Je devinais que quelque chose d’horrible allait se passer, que ce qui me restait de vie allait être la proie de ce fauve. Il fut bientôt tout près de moi. Je voulus me dresser pour me défendre, mais je demeurai inerte, sans force. Je voulus parler, ma langue demeura collée à mon palais. Et je regardai l’homme avec épouvante. À cette minute, je vis briller dans sa main droite le verre bleu sombre d’une petite fiole, j’entendis en même temps un ricanement funèbre. Je tentai de fermer mes yeux pour ne pas voir ce démon, je n’y parvins pas. Et tout à coup je poussai un rugissement de douleur : mes yeux brûlaient. La souffrance fut si atroce que je