LA SECOUSSE
ANDRÉ BERNIER, riche industriel ..... Ovila Legaré
LOUIS, fils aîné ............ Paul Coutlée
JULES, fils cadet ............. Le Bret
JULIE, sa femme ......... Jeannette De Guire
ACTE Premier
(Un après-dîner. M. et Mme Bernier attendent des visiteurs. M. Bernier, dans un fauteuil, lit son journal. Mme Bernier, assise près d’une table feuillette un livre.)
Scène PREMIÈRE
M. BERNIER. — (levant les yeux de son journal.) Bonne nouvelle, Julie !
Mme BERNIER. — (de même que son mari.) Vraiment ?
M. BERNIER. — Les actions de ma société ont monté de huit points hier.
Mme BERNIER, (sans enthousiasme.) — C’est magnifique.
M. BERNIER. — Comme tu dis ça…
Mme BERNIER, (avec indifférence) — Je dis que c’est magnifique.
M. BERNIER. — Je sais bien que tu le dis, mais tu ne le penses pas.
Mme BERNIER. — Comment peux-tu savoir ce que je pense ou ce que je ne pense pas ?
M. BERNIER. — Rien qu’à l’accent de ta voix.
Mme BERNIER. — Il n’a pourtant pas changé.
M. BERNIER. — Oui, il a changé, beaucoup même. Et non seulement ton accent mais toute ta personne, toutes tes habitudes… Enfin, tout ce qui était toi n’est plus le même depuis un certain temps. Que signifie cette transformation ?
Mme BERNIER, (avec un sourire amer.) — Je t’assure, mon ami que tu vois trouble.
M. BERNIER. — Au contraire, j’y vois très clair. Et je sens qu’il y a quelque chose de travers dans notre vie commune.
Mme BERNIER. — Quoi donc ?
M. BERNIER. — Je ne dirai qu’un nom, si tu le veux…
Mme BERNIER. — J’écoute.
M. BERNIER. — Jules…
(Mme Bernier soupire)
N’est-ce pas ? Oh ! je vois clair, je te dis. Je ne parle pas, mais je pense. Je pense et je vois d’autant mieux que c’est moi qui paye toutes ses folies.
Mme BERNIER. — Ses folies ?