père, je crois parler au dépositaire des secrets de ma famille, à celui qui a juré, près d’un lit de mort, de me protéger et de me garder !
Sa voix était profondément altérée par l’émotion, mais c’était bien la voix de Nita, du moins Léon le jugea ainsi.
— Je suis à vous, Madame, dit-il, mon corps et mon âme !
— On prononce ces mots-là bien souvent ! murmura Marguerite. Venez. Dansons. En dansant, je vous parlerai.
Léon la suivit. L’orchestre préludait à un quadrille. Comme ils allaient se mettre en place, la prétendue princesse reprit :
— Je ne pourrais pas danser ! mes jambes chancellent et mon cœur me fait mal… je voudrais de l’air… Emmenez-moi !
Léon, stupéfait, la soutint défaillante dans ses bras.
— Au nom de Dieu, Nita… Madame ! dit-il, que vous est-il arrivé ?
— Venez ! fit Marguerite brusquement au lieu de répondre.
Elle l’entraîna vers une porte-fenêtre donnant sur les jardins.
Il était temps, et si Malevoy éperdu avait pu donner son attention à quoi que ce soit autre qu’elle-même, il aurait vu Nita, la vraie Nita, passer le seuil du salon au bras d’un danseur.
Il ne vit rien, parce que Marguerite tourna l’espagnolette d’une main nerveuse et l’entraîna au-dehors.
— Refermez la porte ! ordonna-t-elle.
Et quand il eut obéi :
— Je suis bien malheureuse, Monsieur de Malevoy, dit-elle, je suis bien seule ! et j’ai peur ! horriblement peur !
Léon, qui la voyait tremblante, la soutint dans ses bras.
Elle s’appuya tout contre lui et poussa un long soupir.
— Cet air froid vous saisit, dit le jeune notaire. Vous frissonnez sous ces légers habits…
— Oh ! fit-elle, qu’importe cela ? Je brûle, plutôt, je brûle. Mon Dieu ! Monsieur