Page:Féval - La Cavalière, 1881.djvu/336

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

333
LA CAVALIÈRE

Les autres prenaient la chose moins gaiement, et quand on se remit à table, il y eut un silence inquiet. Mais la visite n’était pas pour le Banian, car on entendit la porte du rez-de-chaussée s’ouvrir, puis se refermer.

Dans la chambre voisine, la malade se tournait et se retournait sur sa couche. Sa fièvre avait augmenté terriblement. Elle avait de ces pensées qui viennent avec le délire.

— Depuis que j’ai rêvé de ce nom, disait-elle, de cet abominable nom, je me sens devenir folle. Je le vois au travers de mes paupières fermées. J’ai beau me boucher les oreilles, j’entends sa voix. Je jurerais que sa voix est une de celles qui parlent ici près. Douze ans ! toute ma jeunesse perdue ! Est-ce que je le reconnaîtrais après un temps si long, ce Gaddosh ? Est-ce que je me reconnais moi-même quand je demande à mon miroir un souvenir de ma joyeuse paix d’autrefois !