Page:Féval - La Vampire.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
111
LA VAMPIRE

— La vampire !… Mon rêve serait-il une vérité ?

La lampe jeta une grande lueur et éclaira au-dessus de la cheminée un écusson, timbré de la couronne comtale, autour duquel courait la devise : In vita mors, in mors vita.

Puis la lampe s’éteignit.

René appuya ses deux mains contre son cœur révolté.

Ses oreilles tintaient ce mot :

— La vampire ! la vampire !

Et comme il cherchait des objections dans sa raison aux abois, se disant : « Aurait-elle osé me raconter, elle-même sa propre histoire ? » sa mémoire lui répondit :

— C’est la loi ! Elle a obéi à la loi de son infernale existence en me racontant sa propre histoire !

Il poussa un horrible cri, et, sautant sur ses pieds, il se rua contre la porte avec folie. La porte était solide comme un mur.

Pendant une heure il s’épuisa en vains efforts. Quand il tomba enfin, brisé, il lui sembla qu’une lèvre humide et glacée s’appuyait sur sa bouche, et il perdit le sentiment, comme le clocher de Saint-Louis-en-l’Ile carillonnait l’Angelus de midi.

XIII

LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

Deux jours après, c’est-à-dire le 3 mars de cette même année 1804, tout Paris restait en grand émoi par rapport à la conspiration Moreau-Pichegru-Cadoudal, qui avait été, disait-on, si près, de réussir. Le secrétaire général de la préfecture de police reçut avis, vers la tombée de la nuit, qu’un homme insistait pour parler en secret à M. Dubois.

Moreau et Pichegru étaient sous les verrous, mais Georges Cadoudal demeurait libre, et toutes les mesures prises pour découvrir sa retraite avaient échoué.

Le citoyen Dubois, qui devait être comte d’empire, tenait la préfecture de police depuis le 18 brumaire ; il avait fait de son mieux dans les affaires du Théâtre-Français et du Carrousel, néanmoins le premier consul avait de lui une idée assez médiocre et ne le regardait point comme un sorcier, au contraire.

Il y avait, en ce temps-là, plus de polices encore que nous ne l’avons dit, et la police, de M. le préfet était très sévère-