Page:Féval - Le Bossu (1857) vol 1-3.djvu/413

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
189
LE BOSSU.

» Oh ! si tu le voyais, comme tu l’aimerais !…

» Je n’étais jamais entrée dans les murs d’une ville. Quand nous aperçûmes de loin les clochers de Pampelune, je demandai ce que c’était que cela.

» — Ce sont des églises, me répondit mon ami ; — tu vas voir là beaucoup de monde, ma petite Aurore : de beaux seigneurs et de belles dames… mais tu n’auras plus les fleurs du jardin…

» Je ne regrettai point les fleurs du jardin dans ce premier moment. L’idée de voir tant de beaux seigneurs et tant de belles dames me transportait.

» Nous franchîmes les portes. — Deux rangées de maisons hautes et sombres nous dérobèrent la vue du ciel. Avec le peu d’argent qu’il avait, mon ami loua une chambrette. Je fus prisonnière.

» Dans les montagnes et aussi à l’alqueria, j’avais le grand air et le soleil, les arbres fleuris, les grandes pelouses et aussi la compagnie des enfants de mon âge. Ici, quatre murs ; au dehors, le long profil des maisons grises avec le morne silence des villes espagnoles. — Au dedans, la solitude.