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LE BOSSU.

que tes paroles… Et pourquoi, d’ailleurs, aurais-tu ces délicatesses altières des grandes races ?…

Dona Cruz se pinça les lèvres.

— Il paraît, murmura-t-elle, que tu ne crois pas à ma haute naissance ?

— C’est moi qui suis mademoiselle de Nevers, répondit Aurore avec calme.

La gitanita ouvrit de grands yeux.

— Lagardère te l’a dit ? murmura-t-elle sans même songer à faire des objections.

Celle-là n’était pas ambitieuse !

— Non, répondit Aurore ; et c’est là le seul tort que je puisse lui reprocher en sa vie… S’il me l’eût dit ?…

— Mais alors, fit dona Cruz, qui donc ?

— Personne… Je le sais, voilà tout… Depuis hier, les divers événements qui se sont passés depuis mon enfance ont pris pour moi une nouvelle signification. Je me suis souvenue ; j’ai comparé ; la conséquence s’est dégagée d’elle-même… L’enfant qui dormait dans les fossés de Caylus pendant qu’on assassinait son père, c’était moi… Je vois encore le regard de mon ami, quand nous visitâmes ce lieu funeste : c’était moi… Mon ami ne me fit-il pas baiser le visage de marbre de Nevers au cimetière Saint-Magloire ?… Et ce Gonzague dont le nom me pour-