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CHAPITRE IX.

TROIS NOMS.

Cela dura une seconde. À peine Esther eut-elle le temps de remarquer l’élan de cette rage contenue.

Petite déchira la lettre en menus morceaux et la brûla.

Avant que le papier eût fini de flamber, elle avait repris son sourire tentateur.

Elle était forte et toujours maîtresse d’elle-même ; elle savait dominer toute passion et maîtriser toute angoisse.

Son visage était un masque obéissant, même aux heures de trouble. À la lecture du billet, un premier mouvement de colère l’avait emportée, parce que cette nouvelle la frappait à l’improviste : elle n’avait même pas songé jusqu’alors à la possibilité de ce résultat.

Elle avait vu Franz partir le matin pour se rendre au lieu du combat ; son adversaire était un pilier de salle d’armes, et lui ne savait pas tenir une épée.

Depuis trois ou quatre heures qu’elle était éveillée, elle songeait à Franz comme à un homme mort, et même, une fois ou deux, elle avait eu comme une velléité de le plaindre, ce pauvre enfant qui était si beau, si hardi, si joyeux, et qu’elle avait vu naguère pâle d’amour entre ses bras.