Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/244

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Il y avait maintenant une quinzaine de jours que les premiers invités avaient franchi le seuil du château. Quinze jours de fêtes, c’est bien long ; mais le temps avait passé comme par enchantement, et l’ennui s’était tenu toujours à distance.

Le programme s’épuisait cependant. On devait repartir pour Paris sous quelques jours, et plusieurs commençaient à sentir d’avance que le terme de ces belles fêtes serait le bien arrivé.

Il restait deux choses à voir qui soutenaient la curiosité émoussée des hôtes de Geldberg.

Depuis l’arrivée au château, on avait parlé du grand bal masqué de la mi-carême, et d’une chasse aux flambeaux dans l’ancien parc des comtes.

Le bal devait dépasser toutes les magnificences connues. Chacun en avait pu voir les préparatifs dans cette immense salle, soutenue par des piliers gothiques, où se rendait autrefois la haute justice des seigneurs de Bluthaupt.

Cette salle que nous avons vue, dans le prologue de notre histoire, occupée par les serviteurs du schloss, se chargeait maintenant d’ornements splendides, appropriés au style antique de sa construction intérieure.

Quant à la chasse nocturne, les détails principaux en avaient été réglés d’avance dans le mystère de nombreux conciliabules. Les ordonnateurs de la fête présidée par le jeune M. Abel, empereur du sport, et réunis à Mirelune et à Ficelle, qui avaient naturellement voix délibérative, s’étaient inspirés de quelques pages charmantes du livre les Tourelles, où Léon Gozlan, avec sa verve pittoresque et hardie, a décrit les brillantes excentricités d’une chasse semblable.

Ils avaient un théâtre sans rival dans les vieilles forêts de Bluthaupt, ils avaient mille bras empressés et de l’or à pleines mains. Forts de ces ressources, ils prétendaient lutter d’audace et de bizarres merveilles avec l’imagination opulente du romancier.

C’était une copie, mais une grande et riche copie, avec la nature sauvage du Wurzbourg, au lieu des bois civilisés où tentaient vainement de s’égarer les courtisans de Louis XIV.