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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/95

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Après avoir relu, Franz regarda l’adresse, ce qui ne lui apprit rien. Comme le sens était fini au bas de la première page, Franz ne s’était point avisé de chercher plus loin.

En ce moment, et purement au hasard, il tourna la feuille.

Une exclamation s’échappa de ses lèvres.

La lettre n’était pas achevée. Elle contenait encore plusieurs lignes suivies d’une signature.

Franz lut avidement ; la lettre disait :

« M. Franz sera porté peut-être à mépriser cet avis, parce qu’il est brave et amoureux du danger, mais le danger n’est pas seulement pour lui ; mademoiselle D. d’Au… fait partie des invités qui doivent partir avec les Geldberg ; elle partagerait le péril et ce serait sur sa tête que retomberait l’imprudence de M. Franz. »

— Il sait tout !… murmura ce dernier avec stupéfaction ?

Le hasard semblait se charger de prouver une à une toutes les assertions de l’écrivain anonyme. Il annonçait la visite de madame de Laurens, madame de Laurens était venue ; il prédisait l’invitation, l’invitation avait été faite pour ainsi dire dans les termes mêmes de sa lettre ; il parlait de mademoiselle d’Audemer, et Denise venait elle-même certifier son dire, en quelque sorte, et lui donner un dernier certificat de sincérité.

Mais, si bizarres et inexplicables qu’elles fussent, ces coïncidences ne causaient pas seules la surprise profonde de Franz. C’est à peine s’il s’en rendait compte en ce moment.

Il hésitait ; il ne savait plus ce qu’il devait faire par rapport à ce voyage ; mais son irrésolution n’était point réfléchie. Il n’y avait en son esprit que confusion et trouble ; il ne pensait pas.

Ses yeux, grands ouverts, restaient cloués à la signature de la lettre.

Ce n’était pas un nom. C’étaient deux mots qui résumaient pour lui toutes les émotions des jours précédents, deux mots qui le fascinaient, qui faisaient battre ses tempes, qui le ramenaient au plein milieu de cet impénétrable mystère dont s’enveloppait son avenir.

La lettre était signée :

« LE CAVALIER ALLEMAND. »