Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/233

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dans mon âme la joie que les bienheureux doivent avoir au ciel !…

« Je n’espérais guère, car Blanche était l’unique héritière des biens de la famille, tandis que moi je n’avais rien… Je ne me demandais jamais ce que serait l’avenir. Je la voyais : j’étais heureux…

« Eussé-je possédé tous les trésors du monde, je n’aurais peut-être pas espéré davantage. Il y avait tant de respect dans mon amour ! C’était d’en bas toujours que je la contemplais, comme on adore les anges de Dieu… »

Vincent avait la tête penchée sur sa poitrine. Sa voix tremblait et ses yeux étaient humides…

Ce n’était plus de l’ennui qui était sur le visage de Montalt. Une amère pensée plissait son front, et le récit de Vincent lui causait évidemment une sensation pénible.

Le jeune matelot passa le revers de sa main sur son front où perlaient quelques gouttes de sueur.

— Je ne peux pas vous dire, moi, milord, reprit-il avec une sorte de brusquerie, tout ce qu’il y avait de respect timide au fond de mon cœur !… La regarder seulement me semblait de l’audace… et quand je me voyais dans mes rêves effleurer sa douce main d’un baiser, j’avais