Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/258

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Il se nommait Étienne Moreau. Quand on ne lui donnait point de salle de billard à orner ou des perdrix défuntes à grouper avec des lièvres assassinés au-dessus des portes ; quand il désespérait de trouver Diane au jardin et qu’il se lassait de courir la campagne avec Roger, il se retirait seul parfois dans sa chambre. C’était bien rare. Dans sa chambre il n’y avait qu’une toile ébauchée.

La plupart du temps, il regardait cette toile, les bras croisés, sans songer à prendre sa palette.

Mais parfois, lorsqu’un beau rayon de soleil venait jouer dans les hauts châssis de sa fenêtre, il saisissait tout à coup ses pinceaux et ajoutait quelques touches à la toile à peine commencée.

Cela ne ressemblait point aux fresques de la salle de billard, ni aux dessus de portes qu’il peignait avec une fécondité si obéissante pour le maître de Penhoël. C’était une peinture hardie et d’un style étrange.

Le tableau représentait une jeune fille vêtue en paysanne, et jouant de la harpe. C’était le portrait de Diane.

De sa vie, Étienne n’avait rêvé, jusqu’au moment où les traits de Diane de Penhoël avaient surgi, vivants, de la toile, sous son pinceau timide et comme incertain. Maintenant, quand il était seul avec son tableau, il rêvait.