Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/91

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J’enlève votre piccolo, papa Chauvette… Grande misère d’écart !

Ces dernières paroles furent prononcées d’un ton qui ferma péremptoirement la bouche à maître le Hivain. Le jeu se poursuivit en silence durant quelques minutes.

Mais René buvait à chaque instant de l’eau-de-vie, ce qui est un mauvais moyen pour recouvrer le calme perdu. L’impression produite par les paroles de l’homme de loi ne s’effaçait point, et il y avait toujours un nuage sombre sur le front du maître de Penhoël.

Cependant, la distraction de l’oncle Jean devenait un fait remarquable. Depuis plus d’une demi-heure, il n’avait pas prononcé une parole, et son jeu allait à la grâce de Dieu.

Penhoël était dans cette situation d’esprit où l’on cherche instinctivement une victime sur qui décharger sa colère. Il avait accueilli les premières fautes de l’oncle en grondant sourdement.

Maître le Hivain, dit Macrocéphale, se chargea, comme toujours, de mettre le feu à la mine.

— Voilà trois fois que vous mettez du cœur sur du carreau, M. Jean, dit-il de sa voix sèchement doucereuse ; c’est signe d’orage !

René de Penhoël jeta ses cartes sur la table et se croisa les bras.