Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/157

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Ne faut-il pas bien que je vienne préparer votre tisane, bon père Benoît ? moi, qui suis votre médecin !

— Pour ce qui est de moi, répondit le passeur, je n’ai besoin de rien, mes filles… abandonné ou non, mes heures sont comptées… La faim, la soif et la maladie ne pourront pas me tuer, puisque Dieu a marqué la manière dont je dois mourir… Je sais le nombre des jours qui me restent à vivre… C’est bien long !… Cyprienne de Penhoël, vous qui vouliez aller chercher tout à l’heure le prêtre pour dire sur moi la prière des trépassés, vous vous en irez avant moi, ma fille.

Cyprienne, tremblante, baissait la tête. Elle était habituée à croire les paroles du vieillard comme autant d’oracles.

— Ne dites pas cela !… murmura Diane, vous savez bien que nous avons besoin de tout notre courage !…

Mais Benoît Haligan semblait céder à un pouvoir irrésistible. Ce n’était plus le même homme. Sa taille s’était redressée ; son visage s’inspirait ; une flamme étrange brûlait au fond de ses yeux caves.

— Et vous aussi, Diane de Penhoël !… continua-t-il. Toutes deux… toutes deux ensemble !… Ne m’interrompez plus, car ce moment