Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/24

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me semble que j’ai fait un rêve douloureux et impossible… Mais quand je me retrouve seul, face à face avec moi-même, je me souviens, et je souffre !… Bien des fois j’ai été sur le point de parler et d’implorer une explication… mais elle paraissait me deviner… Son regard souriait, se reposait sur moi si calme et si pur !… Je sais bien que je n’oserai jamais l’interroger !

Tout en causant, ils marchaient le long des allées du jardin. Ils s’éloignaient d’instinct du salon de verdure, où les hôtes de Penhoël étaient toujours rassemblés. Roger allait la tête basse et l’air consterné ; Étienne portait sur son visage qui voulait sourire les traces d’une émotion contenue. Peut-être se faisait-il plus fort qu’il ne l’était réellement.

— Ce que tu as vu est étrange, dit-il enfin, ce que j’ai vu est plus étrange encore… Ce mystère qui les entoure, j’aurais pu le percer peut-être… mais je ne l’ai pas voulu… Moi aussi, j’ai rencontré une fois Diane et Cyprienne dans les corridors du manoir au milieu de la nuit… J’étais caché par la saillie d’une embrasure : elles ne m’apercevaient point… Je les vis traverser sans bruit la galerie… Elles dépassèrent ta chambre, la chambre de Penhoël, et je crus qu’elles allaient entrer chez Madame… Mais elles dépassèrent aussi la porte de Madame… Il n’y a rien