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LES BELLES-DE-NUIT.

déjà être à Paris, dans son atelier, pinceaux et palette à la main. Il sentait au dedans de lui-même une ardeur inconnue ; sa pensée fermentait ; devant ses yeux, l’horizon s’élargissait tout à coup.

Il était peintre. Il sentait sa force ; les obstacles qui l’avaient arrêté jadis lui apparaissaient petits et misérables. C’est à peine si son regard dédaigneux pouvait les distinguer en travers de sa route brillante. De la lutte, il ne voyait plus que le résultat, qui était la victoire.

Et alors, il se reprochait d’avoir tardé si longtemps. Que d’heures perdues à ce manoir de Penhoël ! Il remerciait Robert de Blois de l’avoir enfin chassé, car il s’avouait que jamais, de lui-même, il n’aurait eu le courage de quitter Diane.

Il y avait, entre le bourg de Glénac et le marais, une grande allée de châtaigniers qui s’étendait, tortueuse, au bord de l’eau. Les jours d’été, quand le soleil à son déclin se cachait derrière la colline, une brise douce et fraîche s’élevait sur le marais. Étienne se voyait encore assis au pied d’un arbre. C’était l’heure du tacite rendez-vous que nul n’avait donné ni reçu, mais auquel on ne manquait jamais.

Un pas léger se faisait entendre derrière le rideau de châtaigniers ; le cœur d’Étienne se