Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/14

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brave garçon de Reynier, qui sera alors un beau jeune homme tout à fait.

Elle était femme par la taille et par la beauté, mais son cœur restait enfant. Quelques mois plus tard, elle devait s’appeler la comtesse Francesca Corona et apprendre le malheur avec la vie.

— Je sais l’histoire de Vincent ! s’écria-t-elle en courant au vieillard pour le guider jusqu’à la table, je la sais toute. Elle est bien triste et bien touchante. Père, bon père, pourquoi tardes-tu à lui donner beaucoup d’argent ?

Le colonel lui montra du doigt Vincent, qui rougissait.

— Parce que, répondit-il, Vincent est de ceux à qui ont ne donne rien, surtout de l’argent. Ils aiment mieux le gagner.

Il prit la main de Vincent qui le saluait avec un respect reconnaissant et la secoua rondement.

— Pas vrai, compagnon ? ajouta-t-il. Nous sommes fiers comme Artaban ? Cette poupée est aussi grande que père et mère, mais elle met encore ses jolis petits pieds dans le plat. Voyons, trésor, sers-nous le potage. Asseyez-vous, Carpentier, ma vieille ! D’architecte vous êtes tombé maçon, nous vous tendrons l’échelle pour que vous regrimpiez architecte. J’ai un appétit d’enragé aujourd’hui.

Fanchette effleura son crâne d’un de ces baisers rapides que les fillettes seules et les oiseaux savent