Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/30

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deau, la physionomie du colonel avait changé, et quoique ses mains gardassent un tremblement très accusé, il opérait avec une remarquable adresse.

— Il est sûr, reprit-il, que quand un brave garçon peut répondre au commissaire : « Fouillez-moi plutôt ! je ne sais rien de rien, » cela le met diantrement à son aise. Moi qui parle, du temps du roi Murat, je suis resté onze jours et onze nuits dans une cachette au château de Monteleone. On n’est pas là comme à la noce, mais cela vaut mieux que de passer devant une haute cour de justice, pas vrai, bibi ?

— Il s’agit donc d’une cachette ? demanda Vincent.

— Qu’est-ce que tu penses de Louis XVII, toi, bonhomme ? fit le vieillard au lieu de répondre. Voilà une malheureuse créature ! Moi, mes cheveux grisonnaient déjà quand le roi Louis XVI et la reine Marie-Antoinette allèrent à l’échafaud. J’en ai vu couler de l’eau sous le pont ! Je sais des tas de choses. Il y a un Bonaparte, fils de la reine Hortense qui était une jolie femme, ou le diable m’emporte ! Il est majeur de l’année dernière. Ah ! ah ! on joue la poule autour des Tuileries ! Je connais au moins quatre ou cinq billes numérotées, sans compter celle de la République. Et, veux-tu savoir ?… à ce jeu-là on passe souvent par une cachette avant d’entrer dans la chambre du trône… C’est fait ! Colin-Maillard, combien de doigts ?