Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

longs cils soyeux masquaient son regard. Sous la grâce juvénile des contours une énergie puissante perçait.

Vincent, arrêté sur le seuil, car on n’aurait pu faire plus d’un pas dans l’intérieur de la mansarde, se mit à contempler Reynier comme s’il ne l’eût jamais vu. Et, en effet, il est des heures où l’on voit pour la première fois ceux avec qui on a vécu longtemps.

L’habitude empêche de déchiffrer le livre de la physionomie humaine. Nul ne connaît ses enfants.

Vincent avait souri d’abord en portant les yeux sur la planche gravée. Reynier cachait ce travail à l’aide duquel il payait les petits présents qu’il faisait à Irène et à son père d’adoption lui-même. C’était la nuit qu’il maniait le burin.

De la planche, le regard de Vincent alla aux dessins et aux livres, puis revint vers le dormeur lui-même.

Chose singulière, l’idée de Vincent persistait auprès de Reynier comme elle s’était obstinée au chevet d’Irène.

Il songeait à sa nuit. Il se disait :

— C’était bien la même voix, j’en jurerais. « Avez-vous quelque chose à déclarer ?… Merci… » Mon souvenir est net… mais se peut-il que la beauté d’un enfant puisse ressembler ainsi à la décrépitude d’un vieillard ?