Page:Fabre - Les Auxiliaires (1890).djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
70
RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

nocturnes, l’un des doigts antérieurs est mobile et peut se porter en arrière, de façon que la serre se partage en deux couples d’égale puissance lorsque l’oiseau veut saisir, comme dans un étau, la branche sur laquelle il perche ou la victime qui se débat. Un coup de bec brise la tête de l’animal capturé. Ce bec est court, très crochu. Les deux mandibules jouissent d’une grande mobilité qui leur permet, en frappant l’une contre l’autre, de faire entendre un craquement rapide, un cliquetis par lequel l’oiseau exprime sa colère ou sa frayeur. Elles se distendent au moment d’avaler, elles s’ouvrent en un orifice horrible, suivi d’un gosier d’une excessive ampleur.Scarabée sacré.
Scarabée sacré.
Quand elles bâillent en plein, la proie, d’abord pétrie entre les griffes, disparaît en entier comme dans un gouffre. Tout y passe, os et bourre. Il ne reste rien du mulot, pas même le poil. Rarement une proie suffit, et la chasse continue. Quelques souris vont rejoindre le mulot, toujours tuées d’un coup de bec sur la tête, toujours avalées en entier, sans être dépecées. Si quelque gros scarabée se présente, l’oiseau ne le dédaigne pas. C’est une bouchée petite, mais de saveur relevée, épicée d’aromates particuliers qui feront office de digestif. Enfin repu, le hibou regagne son gîte, creux de rocher, tronc caverneux, trou de masure.

Maintenant se fait la haute cuisine de la digestion. Immobile au fond de sa paisible solitude, l’oiseau clôt doucement les paupières ; il se remémore les bons coups qu’il vient de