Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/110

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dibules peuvent encore happer. Ce sont donc bien des motifs de sécurité et non les appétits du ver qui déterminent le choix de la mère pour l’emplacement de l’œuf.

À ce même sujet, un soupçon me vient. La première ration, le Grillon sur lequel l’œuf est pondu, expose plus que les autres le ver à des chances périlleuses. D’abord la larve n’est encore qu’un frêle vermisseau ; et puis la victime est toute récente et par conséquent dans les meilleures conditions pour donner signe d’un reste de vie. Cette première pièce doit être paralysée aussi complètement que possible : à elle donc les trois coups d’aiguillon de l’Hyménoptère. Mais les autres, dont la torpeur devient plus profonde à mesure qu’elles vieillissent, les autres que la larve attaquera devenue forte, exigent-elles d’être opérées avec le même soin ? Une seule piqûre, deux piqûres dont les effets gagneraient peu à peu de proche en proche tandis que le ver dévore sa première ration, ne pourraient-elles suffire ? Le liquide venimeux est trop précieux pour que l’Hyménoptère le prodigue sans nécessité : c’est la munition de chasse dont l’emploi doit se faire avec économie. Du moins si j’ai pu assister à trois coups de dard consécutifs sur la même victime, d’autres fois je n’en ai vu donner que deux. Il est vrai que la pointe frémissante de l’abdomen du Sphex semblait rechercher le point favorable pour une troisième blessure, qui m’a échappé si réellement elle est faite. J’inclinerais donc à croire que la première ration est toujours poignardée trois fois, mais que les autres, par économie, ne reçoivent que deux coups d’aiguillon. L’étude des Ammophiles, chasseurs de Chenilles, viendra plus tard confirmer ce soupçon.

Le dernier Grillon dévoré, la larve s’occupe du tissage du cocon. En moins de deux fois vingt-quatre heures, l’œuvre est achevée. Désormais l’habile ouvrière