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mination vouloient-ils subjuguer complètement la masse des cultivateurs, c’est-à-dire, presque tout le peuple : c’est la passion de l’intérêt qu’ils mettoient en jeu, en frappant la crédulité des hommes par les images les plus grandes. Ce n’est point sous un soleil brûlant & insupportable qu’ils appeloient le peuple dans les campagnes ; les moissons alors sont serrées, l’espoir du laboureur est rempli ; la séduction n’eût été qu’imparfaite : c’est dans le joli mois de mai, c’est au moment où le soleil naissant n’a point encore absorbé la rosée & la fraîcheur de l’aurore, que les prêtres, environnés de superstition & de recueillement, traînoient les peuplades entières & crédules au milieu des campagnes ; c’est-là que, sous le nom de Rogations, leur ministère s’interposoit entre le ciel & nous ; c’est-là qu’après avoir, à nos yeux, déployé la nature dans sa plus grande beauté, qu’après nous avoir étalé la terre dans toute sa parure, ils sembloient nous dire, & nous disoient effectivement : « C’est nous, prêtres, qui avons reverdi ces campagnes ; c’est nous qui fécondons ces champs d’une si belle espérance, c’est par nous que vos greniers se rempliront : croyez-nous, respectez-nous, obéissez-nous, enrichissez-nous ; sinon la grêle & le tonnerre, dont nous disposons, vous puniront de votre incrédulité, de votre indocilité, de votre désobéissance. » Alors le cultivateur, frappé par la beauté du spectacle & la richesse des images, croyoit, se taisoit, obéissoit, & facilement attribuoit, à l’imposture des prêtres, les miracles de la nature.

Telle fut parmi nous l’habileté sacerdotale ; telle est l’influence des images.

La commission que vous avez nommée pour rendre le nouveau calendrier plus sensible à la pensée &

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