Page:Fabre d’Églantine - Le Philinte de Molière, 1878.djvu/39

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À servir un projet aussi simple qu’honnête.
À le persuader je perds en vain la tête ;
Sur son âme intraitable et qu’à présent je voi,
Prenez, si vous pouvez, plus d’ascendant que moi.

L’AVOCAT.

Je ne puis d’aucun droit appuyer ma demande ;
Et ma crainte pourtant ne fut jamais plus grande.
En sortant, j’ai trouvé, monsieur, sur mon chemin
Cet ami qui devait me procurer demain
L’entretien et l’appui d’un homme d’importance :
Il remet à huit jours cette utile audience.
Le temps fuit, le mal vole ; et, dans ses vils détours,
Le crime peut asseoir son succès en huit jours.
Je reviens vous conter cet accident funeste ;
Car votre âme à présent est l’espoir qui me reste.

ALCESTE.

Eh bien, Philinte ? eh bien ?

L’AVOCAT, à Philinte.

Eh bien, Philinte ? eh bien ?Monsieur, je n’ose pas
Vous prier à mon tour ; mais de mon embarras
Si vous êtes instruit, comme vous devez l’être,
Un malheur aussi grand vous touchera peut-être.
Peut-être, répandu dans un monde élevé,
Plus que monsieur, d’hier seulement arrivé,
Plus que moi, qui n’ai pu rechercher quelque trace
Qu’auprès de quelques gens d’une moyenne classe ;
Peut-être, dis-je, vous, monsieur, vous connaîtrez
L’homme à qui l’on surprit ce billet. Vous verrez.
(Il tire son portefeuille, et fait mine de chercher le billet.)
Je consens, sur la foi d’une exacte prudence,
À vous faire du tout entière confidence,
Vous allez voir…

PHILINTE.

Vous allez voir…Non, non, monsieur ; je ne veux pas
Pénétrer ces secrets : ils sont trop délicats.

L’AVOCAT.

Cependant…

PHILINTE.

Cependant…Jugez mieux de ma délicatesse.