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CHAPITRE XIV

DU DROIT DES MINORITÉS

C’est comme un axiome de droit public dans les pays de démocratie que les minorités n’ont aucun droit. « La loi est l’expression de la volonté générale » (Déclaration des Droits de 1789) ; elle est « l’expression libre et solennelle de la volonté générale » (Déclaration des Droits de 1793). — Cette volonté générale, c’est la volonté de la moitié plus un des votants, et dès qu’un parti a la moitié plus un des votants, c’est-à-dire le tiers environ des électeurs, c’est-à-dire le dixième environ des habitants, car les femmes, les enfants et les soldats ne votent pas, il se croit absolument tout permis, lui, représentant du dixième des habitants, contre les neuf autres dixièmes. La minorité n’a pas de droit.

C’est même par un accident qu’elle est représentée. Si, en France, toute la France nommait tous les députés, en un grand scrutin de liste, sans division par circonscriptions, le parti qui aurait quatre millions cinq cent mille voix dans le pays aurait à la chambre tous les députés ; le parti qui aurait quatre millions quatre cent cinquante mille voix n’en aurait