Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/60

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l’art qui se sert de cette chose, l’art qui la fabrique, l’art qui l’imite. Par exemple s’il est question de brides et de mors, il y a l’écuyer qui s’en sert, le sellier et le forgeron qui les fabriquent, le peintre qui en jette sur sa toile une apparence. Celui qui s’entend le mieux en brides et en mors, c’est le cavalier : celui qui s’y entend encore, mais moins bien et comme par routine, c’est le sellier ou le forgeron ; celui qui ne s’y entend pas du tout et qui seulement en saisit et sait en reproduire le dessin, saisit et sait reproduire la sensation fugitive qu’ils font sur l’œil, c’est le peintre. Ce troisième personnage, troisième venu et troisième en degré, ne connaît la chose ni par l’usage ni par la nécessité de converser avec ceux qui en usent. »

« L’imitateur n’a donc ni principes sûrs ni même une opinion juste… Et ainsi nous avons suffisamment démontré deux choses : la première, que tout imitateur n’a qu’une connaissance très superficielle de ce qu’il imite ; que son art n’a rien de sérieux et n’est qu’un badinage d’enfants ; la seconde, que tous ceux qui s’appliquent à la poésie dramatique, soit qu’ils composent en vers iambiques ou en vers héroïques, sont imitateurs autant qu’on peut l’être et que cette imitation est éloignée de la vérité de trois degrés. »