Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/85

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indication, au moins, de quelque chose qui n’a pas été exprimé et qui peut-être ne pouvait pas l’être, elle est bien curieuse : « Il n’y a d’égalité entre les choses inégales qu’autant que la proportion est gardée, et ce sont les deux extrêmes de l’égalité et de l’inégalité qui remplissent les États de séditions. Rien n’est plus conforme à la vérité, à la droite raison et au bon ordre que l’ancienne maxime qui dit que l’égalité engendre l’amitié. Ce qui nous met dans l’embarras, c’est qu’il n’est pas aisé d’assigner au juste l’espèce d’égalité propre à produire cet effet ; car il y a deux sortes d’égalité qui se ressemblent par le nom, mais qui sont bien différentes en réalité. L’une consiste dans le poids, le nombre et la mesure : il n’est point d’État, point de législateur à qui il ne soit facile de la faire passer dans la distribution des honneurs en les laissant à la disposition du sort. Mais il n’en est pas ainsi de la vraie et parfaite égalité, qu’il n’est pas aisé à tout le monde de connaître. Le discernement en appartient à Jupiter, et elle ne se trouve que bien peu entre les hommes. Mais encore c’est le peu qui s’en trouve, soit dans l’administration publique, ou dans la vie privée, qui produit tout ce qui s’y fait de bien. C’est elle qui donne plus à celui qui est grand, moins à celui qui est moindre, à l’un et à l’autre dans la mesure de sa nature. Proportionnant ainsi