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NOTES SUR LES TRAVAUX ET LES JOURS.

époux et pour fils. Dans ce nombre devait être Alcmène, qui eut d’Amphitryon Iphiclus et de Jupiter Hercule. Ainsi ce poëme, que les grammairiens ont intitulé le Bouclier d’Hercule, devrait être rattaché à la Théogonie, les passages qui se trouvaient entre ces deux ouvrages en ayant été séparés par l’injure des ans. » Il est, selon nous, plus naturel de croire que la Théogonie finissait au vers 1,020, ou que du moins à la place des deux vers suivans il en existait d’autres qui se liaient davantage au sujet du poëme et qui lui servaient de complément. Le poëme consacré aux femmes célèbres devait former un ouvrage à part. Plusieurs auteurs le désignent par le titre de Megalai Eoïai ou de Katalogos gunaikôn. C’est à ce poëme que se rattachait probablement le bouclier d’Hercule.




NOTES SUR LES TRAVAUX ET LES JOURS.

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(1) Le commencement du poëme des Travaux et des Jours a été révoqué en doute. Pausanias en effet rapporte que les Béotiens, habitans de l’Hélicon, en retranchaient l’exorde sur les Muses et ne le faisaient commencer qu’à l’endroit où il est question des deux Rivalités. Tzetzès dit qu’Aristarque et Praxiphane, disciple de Théophraste, regardaient les dix premiers vers comme supposés ; Plutarque ne semble pas non plus les reconnaître (Symp. 9, 1, [{{{1}}}]736). Ils sont donc probablement l’œuvre de quelqu’un de ces anciens rhapsodes qui avaient coutume d’ajouter aux poëmes qu’ils chantaient des prologues et des épilogues de leur composition : ils débutaient ordinairement par l’éloge de Jupiter, ainsi que Pindare nous l’apprend (Néméenne, 2, v. 1).

Comme il n’est pas vraisemblable que le poëme ait brusquement commencé par le onzième vers, Hésiode aura composé un exorde qui ne nous est point parvenu et auquel on en a substitué un autre. Si ce début eût été réellement son ouvrage, aurait-il appelé filles de la Piérie les Muses qu’il appelle filles de l’Hélicon dans la Théogonie ? Quoiqu’il dise, dans la Théogonie (v. 53), qu’elles sont nées dans la Piérie, en qualité de Béotien ne leur aurait-il pas conservé ici la qualification qu’il leur donne ailleurs pour flatter la vanité de ses compatriotes ?

Cet exorde, quel que soit son auteur, est remarquable par la peinture poétique du pouvoir suprême de Jupiter, qui renverse ou élève à son gré les hommes. Horace l’a imité dans ce passage :

Valet ima summis
Mutare et insignem attenuat Deus,
Obscura promens ; hinc apicem rapax
Fortuna cum stridore acuto
Sustulit, hic posuisse gaudet.

(2) Cette phrase doit s’entendre dans une acception ironique. Hésiode dit à son frère : « Quand tu seras riche, alors tu pourras intenter des procès aux autres pour leur prendre leur bien. Mais ton premier soin doit être de te procurer par le travail des moyens d’existence.

(3) Heinsius blâme les commentateurs qui ont expliqué deuteron comme s’il y avait to palin. Il remarque que les anciens, lorsqu’ils engageaient la foi de quelqu’un, lui proposaient une première condition à laquelle ils l’astreignaient, et lorsqu’ils voulaient l’engager moins étroitement lui en proposaient une seconde en employant cette formule : « Tôuto deuteros estai, c’est-à-dire : « Si la première chose ne te convient pas, la seconde te sera permise. » Ces mots deuteron esti sont donc synonymes de il est permis (exesti.)

(4) L’épithète de dorophagoi donnée aux rois annonce l’époque d’une corruption et d’une vénalité inconnues aux siècles homériques. Ici le nom de basilées, qui veut dire littéralement la base, l’appui du peuple, n’entraîne pas l’idée que nous nous formons des rois actuels ; ainsi que le remarque Proclus, il signifie les juges et les chefs (tous dicastas cai tous archôntas). Il y en avait quelquefois plusieurs dans un même pays. L’auteur de l’Odyssée (ch. 8, v. 40), dit que les Phéaciens avaient, outre Alcinoüs, beaucoup d’autres rois.

Leclerc prétend que les rois sont appelés dorophagoi parce que, abandonnant le soin de leurs affaires domestiques pour juger les procès, ils exigeaient publiquement un salaire et recevaient en secret des présens de la part des plaideurs. Mais Robinson ne voit pas sur quelle preuve historique Leclerc fonde l’opinion qu’ils recevaient un salaire public : il conclut précisément le contraire de ce passage d’Hérodote (liv. 1, c. 97) relatif au Mède Déjocès, qui exerçait les fonctions de juge : « Comme le concours du peuple, qui regardait ses sentences comme très-équita-