Page:Falconnet - Petits poèmes grecs, Desrez, 1838.djvu/82

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cevra toutes ces portions sanglantes ; tu y joindras l’olive, présent de la fille de Triton. Verse le vin de Bacchus qui excite aux hymnes ; jettes du sel blanc sur la nourriture, joins-y du safran âcre et précieux et d’une couleur dorée : et toutes les autres choses qui mêlées aux mets des hommes excitent leur appétit. Pendant que les chairs cuisent dans le ventre du vase, invoque les dieux par leurs noms secrets ; car les dieux se réjouissent quand dans les sacrifices on les appelle par des noms peu connus du vulgaire. Prie-les de chasser la Mégère, qui machine tous les maux des hommes, loin du vase qui bout, et d’envoyer leur esprit saint sur les chairs sacrées. Quand l’instant sera venu où les chairs devront fournir un ample festin à ceux qui désirent se livrer à la joie du banquet, fais faire aux dieux des libations de lait ; joins-y les produits odorans des abeilles. Que la terre couvre les restes du festin ; couronnez vos fronts de rameaux sacrés arrachés à l’olivier, arbre aimé de Minerve. Il ne suffit pas que vous vous environniez dans vos vêtemens en revenant dans vos demeures ; mais il ne faut même pas détourner vos regards quoique vous changiez de route, il faut retourner dans vos maisons, tenant toujours les yeux fixés sur le chemin qui est devant vous. Et ne parlez à personne, quelque voyageur que vous rencontriez, jusqu’à ce que vous ayez regagné votre foyer. Là, faisant de nouveaux sacrifices aux dieux, brûlez plusieurs espèces d’aromates. Moi, quand j’ai accompli de tels mystères, je comprends toutes les choses de l’avenir, tout ce que les bêtes féroces et les cruels quadrupèdes rugissent entre eux.

XVIII.

NEURITIS.

Je reconnais aussi les qualités de la neuritis pierre chérie de Bacchus. Les immortels écoutent avec plaisir les sacrifices et les prières des hommes qui la possèdent. Si quelqu’un a pressé de son pied nu le dos d’un serpent terrible, que le dard lui ait été enfoncé mortel dans les chairs, la neuritis apaisera ses douleurs. Elle rend un mari l’objet des désirs de son épouse. Pierre divine, utile aux hommes, je sais encore que ta vue est un remède contre la morsure de l’aspic : la couleur est semblable à celle d’un poireau vert.

XIX.

CHABACIOS.

J’ai voulu aussi tenter ta puissance, divin Chabacios et je l’ai éprouvée. Tu nous rafraîchis dans les maladies où la flamme nous dévore et lu nous sers de remède si nous sommes piqués par un scorpion. Fils de Latone, le héros, fils de Péan, m’a dit que toutes ces choses lui avaient été longuement développées. Apollon, irrité contre ma sœur Cassandre, lui ordonna à elle qui savait l’avenir, de l’annoncer aux Troyens qui l’écouteraient. Moi j’ai juré par un grand serment de ne jamais dire une parole fausse aux hommes. Tout ce que je t’ai raconté est donc vrai : tu peux avoir confiance en mes paroles.

C’est ainsi que parla le fils chéri du divin Priam, rendant grâce à l’esclave intrépide d’Hercule. Ces doux entretiens nous adoucirent les fatigues de la route pendant que nous montions au sommet verdoyant de la montagne.

FRAGMENS[1].

I.

Il n’y a qu’un seul pouvoir, qu’une seule divinité, le vaste ciel qui nous entoure de ses feux ! Lui seul a tout créé. En lui roule la création, le feu, l’eau et la terre.

II.

Dieu fait toujours naître une douleur des félicités humaines. Ce sont les horreurs de la guerre et les larmes qu’elles font couler.

III.

De sa main droite, il (Dieu) touche de toutes parts aux extrémités de l’Océan, et la terre roule sous ses pieds.

V.

A DIEU.

Roi de l’air et des enfers, roi de la terre et

  1. Ces fragmens sont tirés des Stromates de saint Clément d’Alexandrie ; mais ils portent un tel caractère de doctrine chrétienne que le lecteur doit les considérer comme une preuve de plus que l’école d’Alexandrie n’a pas été étrangère à la rédaction des œuvres d’Orphée.