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UN DRÔLE DE VOYAGE.

bruit confus : c’était un troupeau d’oies occupées à commérer sur le revers d’un fossé.

Un grand garçon maigre et efflanqué, le gardien du troupeau sans doute, était couché tout de son long à quelques pas de ses élèves.

« V’là deux drôles de petits gars, tout de même, s’écria-t-il en les apercevant ; qu’est-ce qu’ils peuvent bien avoir sur le dos ?

— Ça ne te regarde pas, dit Mimile. Mais ce qui le regarde, c’est ce que je vais te dire. Veux-tu gagner vingt sous ?

— Vingt sous ! Vingt sous pour tout de bon ? » s’écria-t-il.

Il était déjà sur ses pieds.

« Et à quoi faire ? ajouta-t-il.

— Oh ! ça ne sera pas difficile. Es-tu du village là-bas ?

— D’où que vous voulez que je sois ? dit-il.

— Alors, tu connais bien le village ?

— Faut bien, puisque j’en suis jamais sorti…

— Tu connais peut-être aussi Mange-tout-cru ?

— Que trop, répondit le jeune gars ; c’est une vilaine bête, méchant comme un chien enragé, un ramasseur d’enfants qu’il fait travailler de force dans ses carrières. Heureusement qu’il lui est défendu de venir de ce côté de la rivière, où le garde champêtre et les gendarmes ne peuvent pas le souffrir. Sans cela, je serais pas si tranquille à garder mes oies. »

Satisfait de ce premier renseignement, Mimile donna un autre cours à son interrogatoire.