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essais de cuisine.

« Quel malheur ! hein ? répondit Charlot.

— Quelle idée aussi de vouloir faire une omelette sans beurre ! dit Mimile.

— Est-ce que je le savais ? répondit Charlot.

— Cela nous prouve une fois plus, Charlot, qu’on ne sait que ce qu’on a appris. »

Mimile, on le voit, devenait de plus en plus moraliste.

Charlot réfléchit de nouveau sans répondre.

Puis, comme, en définitive, ils ne pouvaient dîner par cœur, et que l’un pas plus que l’autre n’était disposé à recommencer sa malencontreuse cuisine, ils se rabattirent sur les provisions que le feu avait épargnées, et se bourrèrent de pain, de fromage, de miel, de raisiné, arrosant indifféremment le tout et du vin qu’ils avaient acheté, et du lait qu’ils devaient à la libéralité de leur hôtesse.

La nuit n’était pas loin ; comme ils s’étaient levés dès l’aube et que leur journée avait été très-rude, ils s’endormirent le nez dans leur assiette, après avoir échangé quelques menus propos sur les incidents de leur voyage.

Mme Hubert, qui n’avait pas reparu jusque-là, entra en ce moment.

« Pauvres enfants ! » murmura-t-elle, ils sont accablés de fatigue.

Jetant ensuite un regard sur le fourneau, elle sourit en apercevant les côtelettes carbonisées, restées sur un plat, et le résidu de l’omelette au raisiné.

« Comment ! comment ! Est-ce qu’on dort sur une table ? »

Mimile et Charlot, se redressant sur leur siège, regardèrent leur hôtesse d’un air confus.