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UN DRÔLE DE VOYAGE

rêvé et qu’il ne pouvait pas là être question d’un songe. C’est égal, de ne plus rien voir après avoir tant vu, c’était bien étonnant, et Mimile, ainsi que Giboulot, admirait la promptitude d’une telle manœuvre.

« Le général, dit Émile, aura deviné que tu avais peur, et il a fait tout défiler au grand galop.

— Si le général a deviné ça, il a eu bien raison, dit Charlot. Un petit garçon comme moi est plus vrai quand il dit qu’il a peur d’un lion et d’un tigre que quand il dit qu’il voudrait en rencontrer et qu’il pourrait en tuer.

— Bravo ! dit Mimile, bravo, mon Charlot !

— Vous voyez, dit Giboulot à Émile, que les voyages, même les plus fantastiques, forment la jeunesse. Voilà M. Charlot redevenu raisonnable.

— Pourvu qu’il ne le soit pas plus que moi à présent, dit Mimile.

— C’est pourtant extraordinaire, dit Charlot, que nous soyons déjà tout seuls. J’ai peur, Mimile, que le général n’ait pas compris qu’il fallait attendre ma bonne. Qui sait si, avant de rentrer en France, nous ne ferons pas encore de mauvaises rencontres. Ainsi, Mimile, si tu veux, nous irons tout droit par le plus court tout à fait ; nous ne regarderons rien du tout en passant.

— Dis donc, Charlot, lui répondit Émile, si au lieu de mauvaises rencontres nous allions en faire de bonnes, mais, là, de très-bonnes ?

— De très-bonnes ? dit Charlot, de l’air de quelqu’un qui est bien revenu des choses de ce monde ; celles qui pourraient être très-bonnes, Mimile, ne seraient pas possibles avant bien du temps encore. Nos papas, nos ma-