Page:Fauche - Le Mahâbhârata, tome 1.djvu/396

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Il se divertit en compagnie de Viçvâtchi dans les bocages du Nandana ; il fut heureux un temps sur une cime élevée du Mérou dans Alakâ. 3508.

Aussitôt que le prince à l’âme juste, ayant calculé que le temps avait accompli sa révolution, en vit le moment arrivé, il tint ce langage à Poûrou, son fils : 3509.

« J’ai cultivé les plaisirs des sens, mon fils, avec ta jeunesse, dompteur des ennemis, à mon gré, suivant mes forces et suivant les temps. 3510.

» La jouissance de la chose désirée n’éteint jamais le désir ; il s’accroît par elle encore plus, comme le feu, où l’on verse le beurre clarifié. 3511.

» Si tout ce qu’il y a sur la terre de riz, d’orge, de troupeaux, d’or et de femmes n’est pas même suffisant pour un seul homme, ce qu’il a de mieux à faire, c’est de jeter hors de lui son désir. 3512.

» Cette soif, que les insensés ont tant de peine à étancher, ne vieillit pas avec l’homme, qui vieillit ; c’est une fièvre mortelle : heureux, qui peut s’en défaire ! 3513.

» J’ai passé un millier d’années, l’âme toujours attachée aux plaisirs des sens ; et chaque jour ma soif renaissait au milieu de la jouissance. 3514.

» Je veux donc m’en dépouiller ; et, devenu sans désir, indifférent à toute chose, l’esprit tourné vers l’Être absolu, je vais habiter maintenant le séjour des gazelles. 3515.

» Poûrou, je suis content : la félicité descende sur toi ! reprends ta jeunesse et reçois cet empire ; car tu es un fils, qui m’as fait du bien. » 3516.

Alors ce fils de Nahousha, reprit Vaîçampâyana, le roi Yayâti ramena sur lui-même sa vieillesse, et Poûrou en même temps recouvra cette jeunesse, qu’il avait prêtée.