Page:Fauche - Le Mahâbhârata, tome 10, 1870.djvu/249

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» il m’abandonna[1] dans la bataille ; il m’adressa des paroles fâcheuses ; il étendit certainement çà et là son mépris sur un grand nombre de combattants, ô le plus vaillant des guerriers. 3,321.

» Si je vis, Dhanandjaya, je le dois à la puissance de Bhîmaséna. Qu’est-il besoin de parler davantage ? Car je ne puis supporter cette pensée ! 3,322.

» Que la crainte m’ait empêché, Dhanandjaya, de trouver le sommeil une seule nuit, ou de goûter le plaisir un seul jour, nulle part, durant quatorze années. 3,323.

» Objet de sa haine, Dhanandjaya, je suis consumé comme l’oiseau vâdhrînasa[2], arrivé à l’instant de sa mort. 3,324.

» Un long temps s’est écoulé, tandis que je pense à lui de cette manière : comment sera-t-il possible que je détruise Karna dans une bataille ? 3,325.

» Éveillé ou endormi, fils de Kountî, je ne vois jamais que Karna çà et là : ce monde entier est devenu Karna !

» En chaque lieu, où je vais, effrayé par la crainte de Karna, je vois partout ce guerrier, Dhanandjaya, se dresser devant moi. 3,326-3,327.

» Moi, que ce héros, qui ne fuit jamais dans les batailles, après qu’il m’eut vaincu, Prithide, abandonna vivant, avec mon char, avec mes coursiers, 3,328.

» Quel besoin ai-je de la vie, quel besoin ai-je encore d’un royaume, quand j’ai été couvert de blessures par Karna, qui a la beauté des batailles ? 3,329.

  1. Les deux textes portent : abhisritya, m’ayant attaqué ; nous préférons lire : atisrijya, m’ayant abandonné.
  2. Volatile aux ailes blanches, à la tête rouge, au cou noir, appelé de ce nom par les sacrificateurs. Commentaire.