rue, s’en vint timidement vers mon oncle qui riait tout seul en lui-même, rien qu’à songer aux douces joies de son logis.
— Bonjour, capitaine Fraser, lui dit-il, tout en ôtant respectueusement son bonnet de fourrure.
— Bonjour, l’ami ! qu’y a-t-il pour votre service ?
— Vous m’avez donc oublié, capitaine Fraser, puisque vous ne me tutoyez plus ?
— Pardine ! il vient tant de monde à mon magasin que cela serait encore très excusable. Allons, approche ici, que je te reconnaisse !
Le voyageur s’avança vers le capitaine qui lui frappa joyeusement sur l’épaule, en disant :
— Tiens ! tiens ! cet excellent Martial Dubé que j’ai tiré des griffes du capitaine Goreham. Sans moi, mon homme, tu promettais d’être proprement scalpé.
— C’est très-vrai cela, M. Fraser : sans vous ça y était, et l’on me rangeait dans la catégorie des trophées de guerre. Mais tout de même, ce service n’a pas été aussi grand que vous semblez le croire.
— Et comment cela, Martial ?
— C’est que, voyez-vous, capitaine, tout dans Beaumont a été brûlé et mis à sac par les « Rangers » du misérable Goreham ; aujourd’hui, il ne reste plus rien à ma vieille mère qui travaille maintenant à la journée chez des habitants. À son âge, c’est dur, capitaine ! Elle a soixante ans passés, et toute cette misère m’a forcé de partir pour courir ma chance, et essayer de lui venir en aide en montant dans les bois.