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à la brunante.

De son côté, Julie n’apportait pas de dot, et force me fut de prendre en main les affaires de l’ami Jean.

Nous y travaillâmes pendant deux semaines, et quand tout fut tiré au clair, j’arrivai à la conclusion qu’il lui restait cinquante louis de revenu.

À la campagne, on vit honnêtement avec cela, mais à condition de retrancher tout ce superflu qui est une nécessité pour l’intelligence. Il ne faut s’occuper que de la bête, et Jean le comprit si bien qu’il ne voulut pas entendre parler de laisser entrer livres ni journaux sur le compte de ses dépenses mensuelles.

— Bah ! me répondit-il, je trouverai le moyen d’avoir ceux de M. le curé. Il est complaisant ; il me prêtera les siens. Puis, après tout, qu’importent le monde et ses nouvelles menteuses, pourvu que j’aie la conscience tranquille et que ma femme soit heureuse ; voilà le principal !

L’amour l’aveuglait ; pour lui il n’y avait plus rien au-delà, et m’est avis qu’il avait raison.

Jean partit pour la ville. Il avait enroulé avec soin ses économies dans le coin de son mouchoir, et il s’en allait acheter son anneau de fiançailles et son modeste cadeau de noces.

Ses économies ! pauvre ami, maintenant en écrivant ces lignes je me rappelle que depuis plus de deux mois il s’était abstenu de fumer. Chez lui,