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les blessures de la vie.

— Voici un papier qui doit sans doute vous appartenir ; je viens de le ramasser dans la salle où vous avez veillé. En ces temps d’élections, il est bon de ne rien laisser traîner ; soyez sans inquiétude, du reste, je ne sais lire que ma messe.

C’était un billet d’une écriture féminine difficilement formée.

Curieux en grive, je le parcourus.

Le parfum de l’enfance se dégageait de chacune de ces lignes adressées à Paul qui avait sans doute laissé échapper cette missive de sa poche.

Elle disait :

Mon bon frère,

Le couvent est en retraite : j’en suis tout heureuse, et pourtant j’ai pleuré hier. Une petite fille de ma classe, auprès de laquelle j’étais allée m’asseoir pendant la récréation, m’a dit que sa mère lui avait défendu de me parler, parce que je n’étais pas de son rang.

Cela m’a fait beaucoup de peine : mais je n’y pense plus maintenant, puisque j’ai mis mes larmes aux pieds de l’Enfant-Jésus.

Tous les jours, je le prie pour qu’il puisse te continuer le courage de m’élever, et me mettre en mesure de te rendre plus tard par mes soins cette éducation de demoiselle que tu tiens à me donner. C’est lui, sans doute, qui t’a retiré de ces vilains manuscrits qui prenaient des nuits entières à se laisser déchiffrer, pour te faire respirer l’air du repos et de la